Le corpus "Arts et littérature en pays toulousain" s'élargit désormais au domaine des loisirs et propose un ensemble d'ouvrages sur la danse, le sport et les fêtes, qui s'étoffera dans les mois à venir.
En les parcourant, vous aurez l’opportunité d'y découvrir les qualités requises pour la maîtrise des armes et de l’épée et vous pourrez également apprendre à exécuter quelques passes d’allemande grâce à la nouvelle méthode de M. Brives, maître de danse toulousain à la fin du XVIIIe siècle. Vous y trouverez aussi le plus ancien traité de lutte française répertorié : Gymnique française ou méthode pour servir à l’éducation physique publié en 1864 à Toulouse, rédigé par Hugues Coudol, alias Cadet de Moissac, professeur de boxe et de savate très réputé dans ces disciplines. Jules Vallès dans son journal hebdomadaire littéraire, La Rue, le décrit comme un "méridional vif et plein de confiance en lui". Coudol veut réhabiliter l'exercice de la lutte, et propose, pour développer force et souplesse, une méthode composée de 24 exercices de lutte et de 10 leçons de boxe française tous accompagnés d’une illustration explicative.
Ainsi, l'exercice du collier de force (image de gauche) consiste à profiter de ce que l'adversaire soit un peu baissé pour lui enserrer le cou avec les deux avant-bras ; en cherchant à se dégager de cette position pénible, la douleur est si forte qu'il est obligé de fléchir et perd l'équilibre, ses deux épaules touchent alors le sol simultanément, condition indispensable pour remporter la victoire. Et si l'on ne sait plus comment s'y prendre pour vaincre la résistance de son avdersaire, on peut recourir à la prise dite de l'enlèvement de l'homme, décrite dans le vingt-troisième exercice (image de droite) : "on fait semblant de ne pas opposer grande résistance à son adversaire, on lui sourit gracieusement, et au moment où il est sans défiance, par un mouvement très vif, on le prend à la ceinture en placant les bras au rebours : alors au moindre effort il est obligé de céder ; ses pieds perdent terre".
La huitième leçon de boxe française (ci-dessous) nous apprend la conduite à tenir en cas de discussion avec une personne qui nous insulte : "s'il demeure insensible et s'il ne veut pas se rendre à vos raisonnements et à vos paroles conciliantes, si en un mot il vous pousse à bout, vous conservez votre calme, et par un mouvement inattendu et très-vif, vous lui envoyez la paume de la main sous le nez, en tenant les doigts ouverts ; vous le jetez ainsi à terre, à deux ou trois pas de distance, et vous vous retournez ensuite en continuant votre chemin, comme si vous n'aviez eu la moindre difficulté".
Nul doute que le fameux Cadet de Moissac a utilisé les prises citées ci-dessus dans ses nombreux combats, comme celui qui l'opposa à Toulouse à Charles Lecour (1802-1894), même s'il perdit la partie cette fois-ci. Ce dernier fut l'élève de Michel Casseux (1794-1869), premier maître d'armes à enseigner l’art de la savate qu'on appelait alors l'escrime des pieds. La savate, apparue au début du XIXe siècle, est issue à la fois de l'évolution de la pratique du duel, d'un regain d'intérêt pour les activités physiques et d'un besoin de savoir se défendre dans la rue. Charles Lecour, pour sa part, fut l'inventeur de la boxe française (forme sportive de la savate) en 1830-1840 en réunissant la technique des pieds de la savate avec des techniques de poings empruntés à la boxe anglaise. Quant à la lutte française, redécouverte il y a seulement quelques années, elle a beaucoup été pratiquée au XIXe et au début du XXe siècle. Elle a aussi fortement inspiré le règlement de la lutte gréco-romaine, discipline figurant actuellement aux Jeux Olympiques et qui comme la lutte française et contrairement à la lutte libre ne se pratique que sur le haut du corps.
Nous espérons que nos lecteurs feront un usage judicieux et modéré des méthodes et tactiques exposées dans cet ouvrage.
Pour en savoir plus :
Charlemont, Joseph. La boxe française historique et biographique..., Paris, à l'Académie de Boxe, 1899. [en ligne]
Loudcher, Jean-François. Histoire de la savate, du chausson et de la boxe française : de ses origines populaires à sa pratique sportive (1797-1967), thèse de doctorat, Bordeaux, 1996.
Posté le 19/03/2020 | Par Anne-Sophie Bouvet