Perle des perles rares malgré son apparence très modeste, la Perla preciosissima.Añadida y emendada por el reverend padre Frey Luys de Granada, publiée à Lisbonne en 1575, a longtemps été considérée comme perdue par les bibliographes, et n’est connue que par cet unique exemplaire.
Il s'agit une adaptation par Louis de Grenade (1504-1588), auteur spirituel marquant de la Renaissance espagnole, d’un ouvrage de dévotion mystique paru à l’origine de façon anonyme à Tolède en 1525 [1]. Celle-ci devait remplacer l'édition remaniée et très augmentée de ce texte publiée à Baeza en 1551 sous le titre de Perla preciosa et qui avait été mise à l’Index de l’Inquisition espagnole en 1559. Elle était considérée en effet comme trop proche des Alumbrados (Illuminés d'Espagne), mystiques espagnols condamnés comme hérétiques dans les années 1520. La nouvelle version du prédicateur dominicain Louis de Grenade - qui avait pourtant lui-même connu une mise à l’Index cette même année 1559 de quelques uns de ses ouvrages de spriritualité - est approuvée par l’Eglise.
Pendant longtemps, on a cru qu’il s’agissait d’une adaptation d'un texte fameux, dont le titre fait aussi allusion à la parabole de la perle de l’Evangile : l’Evangelische Peerle, texte mystique néerlandais écrit par une béguine, dont la première version imprimée date de 1545 (Margarita evangelica). Mais en fait il ne s'agissait que d'une simple supposition, car personne n’avait pu avoir connaissance du texte de la Perla preciosissima de 1575, dont l’existence n’était attestée que par une référence citant un exemplaire ayant appartenu au collectionneur brésilien Jeronimo Ferreira das Neves. Dans un article de 1978, P. J. Begheyn remet en cause cette hypothèse, mais il a fallu attendre les années 1990 et la publication du 18e tome des œuvres complètes de Louis de Grenade en 1998 pour que la véritable histoire de ce texte soit établie grâce à la découverte d'un exemplaire dans la bibliothèque des capucins de Toulouse, provenant de la Congrégation de l'Oratoire de Saint-Philippe Néri de Braga (Portugal).
Cet exemplaire unique est désormais conservé à la Bibliothèque universitaire centrale de l’Université Jean Jaurès, qui a reçu en 1999 plus de 2 000 volumes de la bibliothèque des capucins de Toulouse, destinés à enrichir les fonds du CADIST Langues, Littératures et Civilisations de la Péninsule ibérique [2]. Cette collection, constituée à partir de 1925 par les pères Michel-Ange de Narbonne et Fidèle de Ros est riche en ouvrages anciens de littérature religieuse ibérique ; l'oeuvre de Louis de Grenade y est particulièrement bien représentée, avec 73 éditions antérieures au 19e siècle.
[1] Perla preciosissima que asegura la vida christiana, parfois attribué à Jeronimo Perez, religieux de l’ordre de la Merci
[2] devenu CollEx Etudes ibériques
Ce livre fait partie du corpus "Ouvrages ibériques anciens des bibliotèques toulousaines"
Pour en savoir plus :
P. J. Begheyn, " De Evangelische Peerle in Spanje en Portugal? ", Ons Geestelijk Erf Antwerpen. 1978, Vol 52, Num 2, pp 24
Louis de Grenade, Obras completas de Fray Luis de Granada. Tomo XVIII. Traducciones: edición y nota crítica Álvaro Huerga, Madrid, 1998
Posté le 04/12/2019 | Par Marielle Mouranche