Tous nos voeux pour cette nouvelle année

En ce début d’année, Tolosana vous offre ses vœux en occitan, plus précisément en « patouës de Toulouso », par la voix de l'avocat toulousain Marcel Céren, véritable spécialiste du sujet. C'est l'auteur des brochures : Les souéts de bouno annado a la fayssou de Goudouli per l'annado 1876, Las estrénos del prumié dé l'An 1880 a Toulouso et Lé prumié dé l'an à Toulouso pér un paysan de Lalando (qui témoignent notamment que les fêtes de fin d’année étaient déjà à la fin du 19e siècle des fêtes de la consommation, pain béni pour les commerçants).

«  Escoutats, se bous play, ço que souéti le may : q'aoujets las potchos plenos, de cadéous é d’estrenos »

(Ecoutez, s'il vous plaît, ce que je vous souhaite avant tout : d'avoir les poches pleines, de cadeaux et d'étrennes)

« Bous souëti dounc la bouno annado, de pla d’aoustros accoumpagnado ; ...qu’anfin, toutjoun countens, jouyousomen passets le temps"

(Je vous souhaite donc la bonne année, accompagnée de beaucoup d’autres,...; et qu'enfin, toujours content, vous passiez le temps joyeusement)

« Souhéti qué bous passets, tan que pouyrets, de la bisito entéressado des médécis, que bous passets des aboucats que soun auntant de grujofats ; souheti … que bostre ennemic aoujo souben dé mal de dent »

(Je souhaite que vous vous passiez, autant que possible, de la visite intéressée du médecin, que vous vous passiez des avocats, qui sont autant de filous ; je souhaite que votre ennemi ait souvent mal aux dents)

Dans la ligne burlesque de ces deux derniers souhaits, voici également quelques vœux de malheur à adresser à votre meilleur ennemi, extraits du Bon soir des moundis. Tust Tust quié- la. Ce texte, publié à Toulouse au milieu du 18e siècle, fournit, à la suite d’un inventaire d’injures en occitan, une liste des pires vœux [1]. Passons sous silence les plus scatologiques, pour ne retenir que quelques-uns des plus absurdes ou burlesques :

« Te soèti las perpelhas coma una bòta de rafes » (Je te souhaite les paupières comme une botte de radis)

« Te soèti las dents e la machoara rengadas coma las nòtas de musica » (Je te souhaite les dents et la mâchoire rangées comme les notes de musique)

« Te soèti que tas costèlas serviscan de cabana al diable per se metre a l’abric del solelh » (Je te souhaite que tes côtes servent de cabane au diable pour se mettre à l’abri du soleil)

« Te soèti que le dòma dels Carmes e des Recolets te serviscan de pendents d’aurelhas » (Je te souhaite que le dôme des Carmes et des Récollets te servent de boucles d’oreilles).

Ces textes de littérature de colportage, dont certains portent l'estampille distinctive, sont devenus rares [1]. Ils sont un témoignage précieux de la langue populaire des Toulousains, de leur vie quotidienne, de leurs divertissements et de leur humour dans une ville qui fut lontemps un foyer de littérature burlesque, satirique et populaire d’expression occitane.

[1] il a été partiellement édité dans l'anthologie publiée par Jean-François Courouau : Rococo d'oc. PUM, 2017

[2] ou même rarissimes comme Bon soir des moundis, dont on ne recense que l’exemplaire numérisé sur Tolosana, conservé à la BU de l’Arsenal (Université Toulouse 1 Capitole).

Pour en savoir plus :

David Escarpit, « Le bon soir des moundis : injures et invectives dans le divertissement populaire occitan toulousain du XVIIIe », dans Occitanica   En ligne

Courouau, Jean-François (dir.). La langue partagée : écrits et paroles d'oc, 1700-1789, 2015.

Jean Fourié, Dictionnaire des auteurs de langue d'oc de 1800 à nos jours, 2009

Posté le 06/01/2020 | Par Marielle Mouranche

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