Figures de plantes : le quinquina

Le quinquina n’est pas seulement un vin apéritif tonique, qui évoque encore quelques souvenirs à certains, mais il a aussi longtemps utilisé dans la pharmacopée.

La planche ici présentée est extraite du tome 2 de Plantes usuelles, indigènes et exotiques … publié à Paris en 1807-1808. C’est le premier livre de Joseph Roques (1772-1580), médecin originaire du Tarn. Après avoir exercé dans divers hôpitaux du Midi,il se consacre à la botanique qu’il décrit comme une « science aimable qui charme les ennuis de la vieillesse, tempère la fougue de la jeunesse ». L’ouvrage traite des plantes médicinales, même si l’auteur indique dans son introduction qu’il a aussi présenté des plantes d’une « utilité médiocre », « à cause de leur beauté et de leur forme gracieuse ». Orné de 133 planches gravées sur cuivre et coloriées à la main, il s’adresse à "toutes les classes de la société". Joseph Roques a donc fait le choix d’un classement par ordre alphabétique, moins scientifique mais plus commode pour ceux (dont les bibliothécaires font partie...) qui « aiment à trouver sans peine l’article qui flatte leur curiosité, sans être obligé de parcourir le livre entier ». Il a cependant pris soin de faire figurer deux tables à la fin du second tome : une selon la méthode de Jussieu et l’autre selon le système de Linné. Il consacre pas moins de 12 pages au quinquina, plus une planche où 4 espèces sont représentées. Après une courte description botanique des différentes espèces, il décrit longuement les propriétés médicinales du quinquina (qui était alors utilisé principalement pour le traitement des fièvres, mais aussi d'autres affections), ainsi que ses différents modes d’administration : « réduit en poudre fine sous la forme d’électuaire [mélange obtenu avec du miel] ou dans une quantité suffisante de vin de Bordeaux », en infusion aqueuse, pour les « vieillards, les enfants ou les personnes délicates », ou même en lavements.

Le nom de cet arbre tropical originaire de la cordillière des Andes, de la famille des Rubiacées,vient de l’inca « kina kina » (écorce des écorces). On ne sait en fait pas grand-chose de l’usage thérapeutique que faisaient les Indiens du quinquina. Selon la tradition, la comtesse de Chinchon, femme du vice-roi du Pérou, aurait été guérie du paludisme vers 1630 grâce à de l’écorce de quinquina réduite en poudre, et introduit ce remède en Espagne. Il semble plutôt que ce soient les jésuites qui aient expérimenté ce traitement contre le paludisme. De fait, ils en ont assuré la promotion dans toute l'Europe dès les années 1630. En France, l’utilisation du quinquina pour soigner le Dauphin et Louis XIV favorise sa diffusion dans le royaume. Au 18e siècle, les premières descriptions botaniques de la plante sont dues à Charles de La Condamine et Jussieu et ont servi de base à Linné pour établir le genre Cinchonna, dont le nom est un hommage à la comtesse de Chinchon. Le principe actif du quinquina, la quinine, n'est identifié qu’en 1820 par les pharmaciens français Joseph Pelletier et Joseph Cavantou, alors que son usage thérapeutique est en plein développement. Pour faire face à la demande, la culture du quinquina est introduite dans plusieurs régions tropicales. En 1944, la synthèse totale de la quinine est réalisée par Robert B. Woodward et William von Eggers Doering. Détrônée dans les années 1950-1960 par les produits de synthèse, la quinine extraite directement de l’écorce du quinquina est actuellement toujours utilisée pour le traitement de certaines formes du paludisme.

Le quinquina a longtemps été administré sous forme d’infusion dans du vin ou de la liqueur. C’est ainsi notamment que le pharmacien Joseph Dubonnet élabore en 1846 une boisson- médicament destinée aux soldats de la Légion étrangère. Elle est ensuite servie en apéritif et deviendra à la fin du XIXe siècle, sous le nom de « Quinquina Dubonnet » l’un des plus célèbres « apéritifs fortifiants » servis jusqu'au milieu du XXe siècle aux adultes comme aux enfants.

Cet ouvrage fait partie du corpus Flores.

 

Pour en savoir plus : Gaston Guibourt et le quinquina. Exposition virtuelle. BIU Santé, Paris, 2010

Botanique et médecine anciennes à travers le patrimoine des universités toulousaines. Catalogue d'exposition.  SICD de Toulouse, 2005

Posté le 21/08/2019 | Par Marielle Mouranche

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